Portraits d'entrepreneurs

WePot relocalise les ollas

By: GENILEM | juin 13, 2023 | 4 min de lecture
equipe wepot

Les ollas, ce sont ces jarres en céramique qui permettent d’irriguer les végétaux en continu. WePot, jeune entreprise fondée par deux étudiants en 2018 a permis de relancer une production romande de ces outils, clés pour une culture écologique de légumes. Elle a remporté deux prix au concours PERL 2023. 

Ils portent en eux la graine de l’entrepreneuriat durable. Lorsqu’ils se rencontrent à HEC Lausanne, Clément Pérez, 28 ans et Quentin Kany, 27 ans sont étudiants et savent qu’ils rêvent de monter un projet « avec un impact positif sur la planète. » Ils participent en 2018-2019 au concours START et travaillent sur un concept de potager urbain autonome. « C’est là qu’on a découvert les ollas », ces jarres en céramique utilisées depuis des millénaires pour optimiser l’irrigation dans les cultures méditerranéennes. Les deux entrepreneurs bifurquent et se spécialisent dans cet objet.  

ollas wepot

Ils collaborent avec l’ECAL pour lancer un premier modèle, conçu par des employés dans des ateliers protégés : la dimension locale, sociale, d’innovation est déjà là. Premiers clients et premières ventes en 2019. Mais en 2020, alors que la demande explose en plein confinement les jeunes entrepreneurs sont freinés : la fermeture des ateliers protégés les contraints à apprendre le métier de céramiste et à produire par eux-mêmes.  

Contactés par d’importants distributeurs, ils doivent trouver une solution pour augmenter les volumes. En novembre 2021, diplômés d’HEC, ils trouvent des investisseurs et emménagent dans un local de 600m2 à Villeneuve. Pauline Dantan, une troisième associée rejoint l’équipe pour superviser la production. En 2022, les entrepreneurs peuvent se verser leurs premiers salaires, l’équipe est renforcée, le chiffre d’affaires doublé, les fournisseurs sécurisés.  

En 2023, l’ambition est d’assurer la rentabilité et de préparer l’entrée sur le marché alémanique en 2024. Pour ce faire, l’entreprise envisage de s’industrialiser et d’acquérir une machine à 500 000 francs. Pour ses futurs développements, WePot imagine des implantations et productions locales (Amérique latine p. ex) pour limiter les transports.  

Elle compte aujourd’hui sept salariés sur son site de Villeneuve. Pour la première fois cette année, ce dernier accueillera des workshops de permaculture et de fabrication d’ollas. Signe qui confirme le potentiel de l’entreprise : en 2023, WePot est lauréate du Prix Entreprendre Région Lausanne (PERL) avec deux récompenses : coup de cœur du jury et prix du public 

En quoi vos produits se distinguent des ollas déjà disponibles sur le marché ? 

Quentin Kany :  La plupart des fournisseurs remettaient au goût du jour le métier de céramiste ou de potier. Nous avons utilisé une autre technique pour créer le produit :  nous procédons par coulage sur un moule de plâtre, lui-même basé sur un noyau conçu par une imprimante 3D. Chaque moule permet de faire 250 à 300 pièces. Cela nous apporte plusieurs avantages : il n’y a pas besoin de main-d’œuvre qualifiée, nous pouvons réaliser des formats très originaux et la propriété physique de l’objet reste identique puisqu’il est en terre cuite. Nous sommes plus chers que des produits importés. Mais notre idée était d’avoir un circuit court local, social et swiss-made.  

produits wepot

Comment veillez-vous à l’écologie dans le système de production ? 

La technique de coulage est intéressante parce qu’elle permet de récupérer la matière, tant que rien n’est cuit. Les modèles non réussis peuvent ainsi être retravaillés : il n’y a pas de pertes. Enfin, tous nos envois par la poste font appel à des copeaux de bois que l’on peut réutiliser dans son jardin, nous avons banni le plastique à usage unique. Nous envisageons un label, par exemple B-LAB. Et nous avons déjà les labels swissmade & Solarimpulse. Pour le moment, la priorité reste la rentabilité de l’entreprise mais dès que ce cap sera franchi, certifier la durabilité sera une priorité. L’écologie est clé pour nous : une olla économise 40 litres l’eau/an en moyenne. L’utilisation sobre des ressources naturelles est au cœur de notre discours, de nos arguments de vente… Et de nos pratiques.  

Vous avez été entrepreneurs en étant étudiant, quels conseils donnez-vous à celles et ceux qui connaissent ce double statut ? 

Lancez-vous ! Il ne faut pas attendre d’avoir un projet parfait : celui-ci n’existe pas ! Plus tôt on apprend, plus tôt on a de l’expérience, et c’est ça qui est précieux dans le métier ! 

Vous avez été coachés et suivis par une série d’organismes, qu’avez-vous apprécié dans ces aides, et en particulier l’accompagnement apporté par GENILEM ? 

D’une manière générale, quand on entreprend, on est centré sur notre projet, sans horizon sur six mois, un an ou même des problématiques actuelles. Les coachs nous apportent tous ce recul. Le second avantage, c’est l’énorme possibilité de networking qu’offrent ces organismes, notamment GENILEM. Ils nous ont également mis à disposition des outils et formations qui nous ont été précieux (je pense aux business plan, business model canvas). GENILEM nous a aussi conseillé dans la mise en place de notre premier Conseil d’administration fictif…très précieux quand nous avons dû mettre en place un vrai conseil d’administration ensuite !  

Ces aides sont importantes mais peuvent être redondantes. Il faut choisir le programme dont on a besoin : certains incubateurs sont prévus pour des entreprises en cours de création, d’autres programmes sont adaptés aux sociétés qui ont déjà des clients.  

WePot pitch devant jury GENILEM

Le plus gros challenge que vous ayez connu ? 

En 2022, en début de saison, un fournisseur nous a lâché. C’était vraiment une erreur de débutant de notre part. Plusieurs personnes nous avaient conseillé le multisourcing ! Nous avons passé deux mois à stresser sans matières premières et avec des équipes à financer. C’est une erreur qu’on ne referra plus.  


Propos recueillis par Camille Andres