Portraits d'entrepreneurs

RockNow, les sites de grimpe à portée de main

By: GENILEM | mai 6, 2021 | 4 min de lecture

Féru d’escalade, Sébastien Wenger a développé une app facilitant l’accès à des cartes topographiques pour l’escalade (topos), et qui intégrera plusieurs services dont du coaching personnalisé. Accessible par abonnement, l’outil s’inscrit dans un secteur en forte croissance.

Il avait pris plusieurs semaines de vacances pour grimper, librement, à travers les Alpes. Il s’est retrouvé à perdre des jours entiers pour s’informer sur les sites d’escalade : où grimper, quel matériel prévoir, quelles difficultés sur les parois… ? Après ce road-trip décevant en 2015, Sébastien Wenger, professeur d’escalade à Genève, s’est senti happé par une « sorte de mission à résoudre » : démocratiser l’accès aux sites de grimpe. Débrouillard, volontaire, l’entrepreneur qui a déjà exercé des dizaines de métiers, se forme sur le tas en stratégie entrepreneuriale, marketing, design, développement web, et code lui-même une application regroupant des topos d’escalade, Topotop climbing.

Il lui faudra quatre ans pour parfaire l’outil rebaptisé RockNow « pour plus de fluidité », et fonder l’entreprise éponyme en mars 2021, avec une détermination hors du commun… qu’on devine issue de son expérience de grimpeur.

Captures d’écran de RockNow (DR RockNow)

Durant ces années, le projet de l’outil s’enrichit, devient une app complète, permettant de suivre ses propres performances, contribuer à modifier des informations si elles ont changé… A terme il permettra de mettre en relation profs et élèves, trouver des gîtes à proximité d’un site de grimpe, etc… Autant de fonctionnalités indispensables dans un marché en plein essor : « on était 35 millions de grimpeurs en 2013, nous sommes 75 aujourd’hui ! ». Ces fonctionnalités rendent aussi l’outil incontournable, social, et ouvrent donc la voie à un business-model autour de l’abonnement.

Pour parfaire son projet, Sébastien Wenger s’associe à Thomas Dupas. Les deux cofondateurs apportent le capital de départ à l’entreprise, qui obtient aussi une bourse de la Fondation pour l’Innovation Technologique (FIT).


Captures d’écran de RockNow (DR RockNow)

RockNow est entrée dans un cycle de financement qui doit accompagner sa croissance : aujourd’hui, son app compte 3 000 longueurs ou topos dans sa base de données, elle en vise 15 000 d’ici fin août. La startup espère cet été prouver la viabilité de son modèle sur une zone géographique, les Bouches-du-Rhône. Avant de lever des fonds pour atteindre 2 000 abonnés, et s’étendre dès fin 2021 à la région Provence-Alpes-Côtes d’Azur (PACA), qui, outre un taux d’ensoleillement record, compte une large communauté de grimpeurs actifs toute l’année. Elle s’étendra ensuite au reste des Alpes. La pandémie reste une problématique majeure, mais elle ne devrait pas stopper totalement la pratique de la grimpe en extérieur. Au contraire, elle pourrait même la favoriser, estime Sébastien Wenger qui revient pour GENILEM sur son modèle de développement.

Il existe beaucoup d’autres app d’escalade, comment développer une technologie qui soit rentable dans ce secteur ?

Sébastien Wenger : Notre force, et ce qui explique qu’il nous a fallu quatre ans de conception, c’est d’avoir développé un workflow, qui permette de produire des informations sur une voie d’escalade de manière quasi automatisée. Pour recueillir cette information, il faut en principe envoyer sur place un topographe, qui reporte un certain nombre de voies. Nous avons réussi à accélérer ce processus. En six mois, nous pourrons proposer au public un nombre significatif de voies. Notre solution permet de grandes économies d’échelle.

Comment se déroule votre stratégie de financement ?

Thomas et moi-même avons apporté la grande majorité des fonds de départ. Une petite partie supplémentaire nous a été amenée par des proches convaincus par notre projet et nous avons obtenu 20’000 francs de bourse de la Fondation pour l’Innovation Technologique.  Une fois sur le marché, nous espérons solliciter un prêt auprès de la FIT pour soutenir notre développement et nous préparons d’ores et déjà le prochain round de financement pour la fin de l’année!

Vous avez découvert l’entrepreneuriat, en quoi le coaching de GENILEM vous aide ?

GENILEM est précieux pour la mise en réseau et le partage d’expertise : GENILEM nous aide à accéder à des gens qui ont eu un parcours similaire avant nous, avec qui nous pouvons échanger. Cela nous apporte aussi des compétences externes. Par exemple dans les domaines du marketing et du design, où nous sommes autodidactes, GENILEM nous a ouvert l’opportunité d’un parrainage par des professionnels de Procter & Gamble qui nous ont permis de valider notre discours commercial, là où nous aurions encore pu passer des mois à les peaufiner…

Les ‘puristes’ de l’escalade sont critiques envers les technologies numériques, qui comme Instagram, popularisent des sites, y créant des embouteillages. Comment vous positionnez-vous dans ce domaine ?

Effectivement l’escalade connaît un vrai changement de paradigme en ce moment. Nous y sommes confrontés. En même temps, cet engouement est une force : quand nous postons une annonce pour trouver un topographe, nous nous retrouvons avec 250 postulations ! Le marché est en expansion notamment car beaucoup de gens ont découvert la grimpe en salle, ces dernières s’étant multipliées.  Ces personnes qui n’ont pas appris en extérieur ont besoin d’être rassurées, d’avoir des informations facilement accessibles et simples à interpréter lorsqu’elles se retrouvent sur des sites en pleine nature. Nous voyons donc notre mission comme double. D’un côté, apporter une information la plus claire possible à une population débutante. Mais aussi éviter l’engorgement des sites les plus célèbres en cartographiant des falaises avoisinantes, belles et intéressantes, souvent méconnues. C’est tout un patrimoine à connaître et revaloriser !

Propos recueillis par Camille Andres