Se lancer à l’international : rêves, réalités et risques pour les PME et startups suisses

Pour beaucoup d’entrepreneuses et entrepreneurs suisses, s’étendre à l’international est une étape naturelle de croissance. Pourtant, derrière l’ambition se cache une réalité complexe, faite de choix stratégiques, d’investissements souvent invisibles, et d’écueils culturels ou logistiques.
Nathalie Mossaz, la fondatrice de la marque Genevoise de souliers végans BIKKOU nous confiait justement au sujet de son désir d’internationalisation : « C’est l’enfer ! Comment stocker, depuis où envoyer, via quel transporteur ? Il m’a fallu comprendre qu’il fallait avoir un stock en Europe pour envoyer en Europe, avoir un représentant fiscal, etc. puis savoir comment remplir les documents d’envoi, les factures, les numéros HS, le DDP, etc. »
Chez GENILEM, nous accompagnons quotidiennement des entrepreneuses et entrepreneurs confrontés à ces défis.
Voici un tour d’horizon des questions clés à anticiper.
1. Choisir son marché et ses canaux de distribution : pas de recette miracle
Décider où se lancer n’a rien d’évident. La proximité culturelle, la logistique, les barrières réglementaires ou douanières, tout doit être mis sur la table. Le cas de Nathan Bonjour, fondateur de NBO, startup spécialisée dans le matériel pour musiciens, est éloquent. Après un début prometteur aux États-Unis et en Amérique du Sud avec des distributeurs majeurs et des commandes en pleine explosion, les droits de douane américains sur les produits chinois ont été relevés à 145%. Une véritable claque pour une entreprise produisant en Chine. Si la délocalisation vers des pays voisins est une option, l’incertitude reste grande.
La gestion du canal de distribution est un autre point souvent sous-estimé. Passer par des revendeurs signifie partage de marge et perte de contrôle sur l’image de marque. Pourtant, à moins d’avoir les moyens humains et financiers d’être présent localement, difficile de faire autrement. Savoir trouver de bons partenaires ou « ambassadeurs » sur place devient alors vital, surtout pour les produits physiques (hardware).
2. Fiscalité, TVA et barrières réglementaires : l’autre côté du miroir
L’international, c’est aussi plonger dans les dédales fiscaux. La TVA à l’étranger, notamment pour les abonnements online ou les services digitaux, crée souvent des situations compliquées où la complexité légale freine le développement. Sans oublier les exigences de certificats d’origine, de réglementations comme CITES, ou de documents spécifiques à l’export.

Heureusement, des structures comme le SGE (Alice Roy, Bastien Bovy) ou la CVCI (Serge Sahli) offrent accompagnement, formations et accès à des outils tels que les carnets ATA.
Le SPEI dans le canton de Vaud peut également cofinancer, pour les projets qui respectent les critères d’éligibilité, jusqu’à 50% des frais liés à la participation à des foires internationales.
Dans le domaine médical, Virtuosis une entreprise nouvellement accompagnée par GENILEM fait face à de nombreuses contraintes régulatoires notamment liées à ce secteur spécifique.
Lara Gervaise explique : « Pour nous aider, nous faisons appels à plusieurs organismes issus de l’écosystème ‘incubateurs, accélérateurs’ et nous échangeons énormément avec d’autres startups qui ont grandi dans ces pays ou qui s’y sont installées avant nous. »
De même, plusieurs de nos entreprises accompagnées nous mentionnent que le gros problème lorsque l’on veut vendre en ligne, est celui de la double devise Euros/CHF, car on n’a pas le droit de vendre en CHF en Europe. Ensuite, il faut encore adapter la TVA à chaque pays, ce qui implique des prix différents par pays. Or souvent les clients ne comprennent pas pourquoi les prix changent en fonction de leur pays. Par ailleurs, comme en témoigne Jérémy Girard de Brio Maté, une marque de boissons énergisantes naturelles au Yarma Maté, qui s’est déployée à l’international : la douane rajoute souvent un délai inattendu, il est essentiel de prendre de la marge afin d’éviter le stress lié au retard de livraison.
3. Marketing culturel et implantation : s’immerger pour réussir
Penser que ce qui fonctionne en Suisse fonctionnera ailleurs est une erreur classique. Les codes consommateurs varient, tout comme les attentes vis-à-vis du service ou du produit. Investir dans une vraie compréhension culturelle, recruter localement, former ses équipes sur place, sont autant d’étapes essentielles. Selon Jérémy Girard, “il faut éviter de penser que tous les pays fonctionnent de la même manière. Chaque pays à des particularités différentes auxquelles il faut adapter le produit et sa manière de travailler.”

Il ne faut pas négliger non plus tout le travail lié aux traductions, aux adaptations marketing, à la présence sur les salons locaux, ou la publicité ciblée sur les réseaux sociaux : ces coûts sont réels mais souvent difficilement prévisibles. “Il faut travailler autant que possible avec des experts locaux qui ont l’expérience et connaissent les astuces du marché” conseille le co-fondateur de Brio Maté.
Des programmes comme ceux proposés par Swisnex (camps de validation de marché) aident à « limiter la casse », mais l’internationalisation reste une aventure qui exige préparation et patience.
En conclusion, l’export est une formidable opportunité pour les PME suisses, mais c’est aussi un parcours exigeant. Les entrepreneuses et entrepreneurs que nous accompagnons chez GENILEM nous le répètent : sans réseaux solides, sans partenaires fiables et sans immersion culturelle, la route reste semée d’embûches. C’est là où le soutien de GENILEM prend tout son sens, car les partages d’expérience entre pairs et les conseils de notre réseau pourront permettre d’éviter les écueils d’un développement à l’international.
Bien s’entourer, se former, tester, être flexible : voilà les vraies clés d’une expansion réussie.
— Gabrielle Loeb, Coach chez GENILEM
Références utiles :
A propos de GENILEM
Fondée en 1995, GENILEM est une association à but non lucratif dont la mission est d’aider les entrepreneuses et entrepreneurs des cantons de Vaud et Genève à créer des entreprises innovantes et viables.
Pour augmenter les chances de succès des jeunes et futures entreprises, elle offre différents services qui vont du diagnostic de projet, permettant d’échanger sur son idée de business et de définir les prochaines étapes à accomplir, à un programme d’accompagnement stratégique et opérationnel sur 3 ans dont l’objectif est de consolider et accélérer le développement de l’entreprise.