Moomenti, une autre expérience du luxe
Fondée par un ingénieur et un cadre supérieur dans l’industrie bancaire, l’app Moomenti permet de réserver des moments de loisirs dans des hôtels de luxe. Un outil en phase avec le tourisme d’aujourd’hui.
Robert Recupero a beaucoup fréquenté les hôtels, en vacances ou pour le travail, alors qu’il était managing director pour une grande banque privée genevoise. Papa solo, il a souvent voulu accéder aux services ou activités pour enfants d’un hôtel voisin du sien. Mais dans l’écosystème du luxe, sans être client·e pour une nuitée, l’accès aux installations d’un établissement est souvent compliqué. Ou alors, cela demande un processus de réservation « très 20ème siècle ». C’est ainsi qu’est née l’idée de Moomenti, plateforme et app pour réserver et payer l’accès à des spas, piscines, lounges de cigares, soins… sans pour autant y passer la nuit.
Le développement a été rapide: en 2021, Robert Recupero, après un parcours de 20 ans dans la finance et la tech, s’associe avec un collègue, Pedro André Cunha, ingénieur EPFL, chargé de concevoir le développement de l’outil. L’opérationnalisation est confié à une agence de développement renommée, basée au Portugal. En mai 2022, l’outil est disponible au téléchargement (Apple Store et Androïd). Le financement, un demi-million de francs pour le moment, a été assuré grâce aux fonds personnels des deux entrepreneurs et à leur réseau proche, les fameux « friends & family», tous ces premiers investisseurs étant genevois.
Le fonctionnement de l’app est simple: les hôtels mettent à disposition les créneaux et services disponibles (sur un créneau de sept jours) et maximisent ainsi l’utilisation de leurs ressources. L’app est compatible avec plusieurs systèmes de réservation hôteliers, permettant aux établissements d’automatiser l’information sur la disponibilité des installations.
La startup se rémunère sur les transactions réalisées. Le concept vise différentes catégories de profils clientèle : locales et locaux en quête de dépaysement non loin de chez eux, vacancier·ères en séjour qui souhaitent tester des équipements d’un hôtel voisin, touristes à la journée qui aimeraient profiter d’un moment de détente.
Moomenti compte pour le moment 15 partenaires en Suisse, un chiffre amené à grandir rapidement puisqu’un partenariat a été signé avec le groupe Swiss Deluxe Hotels. L’entreprise se concentre en 2023 sur l’acquisition de nouveaux partenaires, « des établissements 5 étoiles, voire 4 étoiles triés sur le volet », explique son fondateur. En 2024, elle cherchera à conquérir le grand public.
Entretien avec son fondateur, Robert Recupero :
Vous avez choisi de vous adresser à l’industrie du luxe. Que faut-il savoir pour travailler dans ce milieu ?
Robert Recupero : Mon cofondateur et moi venons de la banque et de la finance. Cette expérience a été un atout. Nous avons par exemple utilisé des méthodes de développement qui partent de l’expérience client, la plaçant au centre du concept : les « solutions interviews. » Les résultats excellents obtenus lors de ces entretiens nous ont permis de valider le besoin et le marché, mais aussi de concevoir un outil avec une ergonomie irréprochable.
Cependant, nous avons vite compris que montrer sa crédibilité ne suffit pas. Le milieu du luxe est assez méfiant envers ceux qui ne viennent pas « du sérail ». Nous avons alors choisi une ambassadrice de marque issue de l’EHL, et d’une famille hôtelière. Cela, tout comme notre partenariat avec Swiss Deluxe Hotels, a beaucoup changé les choses, et nous a permis de rencontrer les bonnes personnes. La vraie difficulté est ensuite de convaincre les hôteliers, notre principal challenge. Il faut faire preuve de professionnalisme à tout instant, dans ce secteur, il n’y a pas droit à l’erreur. Par contre, une fois qu’un accord est signé, votre partenaire devient un réel avocat de votre marque et fait preuve d’une solide loyauté. L’un des hôtels genevois avec qui nous travaillons nous a par exemple convié à un rendez-vous clé pour l’industrie, l’ International luxury travel market à Cannes, pour nous permettre de développer notre réseau.
Vous avez lancé Moomenti alors que vous étiez en poste dans une grande banque, quel conseil pour des entrepreneuses et entrepreneurs en emploi qui hésitent à se lancer ?
Le vrai déclic, c’est l’équipe ! J’ai managé beaucoup de personnes tout au long de ma carrière. J’ai compris que ce qui compte c’est d’être entouré des bonnes personnes. Je ne me serais pas lancé sans cette équipe, et sans l’advisory board très qualifié que nous avons rapidement mis en place : experts en marketing et dans l’hôtellerie nous ont rapidement aidés à valider les bonnes décision, à prendre les bonnes orientation.
Avec votre expérience et votre réseau, pourquoi avoir sollicité GENILEM ?
Je ne suis certes pas un perdreau de l’année, reste que c’est la première fois que je montais ma boîte ! Pour tout le côté création d’entreprise, j’avais besoin d’expériences et de retours de gens déjà passés par là. Parler avec notre coach m’a beaucoup aidé. Il faut avoir l’humilité de penser que malgré une carrière solide, s’entourer pour un nouveau défi permet d’éviter de faire des erreurs propres aux startups. Par exemple, j’étais prêt à signer un contrat avec une chaîne hôtelière « all inclusive » au Mexique, ce qui nous aurait apporté toute une série de partenaires. GENILEM m’a conforté dans l’idée que cela nous sortirait de notre segmentation, qui est celle du luxe très haut de gamme, et que cela n’était pas opportun à cette phase de développement.
Quelle est la place de la durabilité chez Moomenti ?
Pour ce qui est du fonctionnement de l’entreprise : nous fonctionnons pour le moment en « remote ». La durabilité sera prise en compte au moment où nous mettrons en place nos propres locaux. D’ici 5 ans, j’espère avoir près de 200 partenaires sur la plate-forme, et promouvoir à ce moment-là des modes de séjours écoresponsables, peut-être au moyen de labels, cela reste à élaborer avec nos partenaires. La durabilité devient un critère important dans le choix d’une expérience hôtelière, surtout dans le luxe.
Propos recueillis par Camille Andres