ORYL Photonics, le laser au service de la pharma
Fondée en 2020, la startup ORYL Photonics développe une technologie laser visant à simplifier les tests pharmaceutiques. Après plusieurs levées de fonds, l’entreprise dispose d’un prototype avancé et espère commercialiser sa solution en 2026.
Leur technologie brevetée, issue des recherches sur les lasers à l’EPFL, n’avait pas d’application précise. Ce n’est qu’en échangeant avec d’autres laboratoires de l’école que les trois cofondateurs d’ORYL Photonics réalisent, en 2020, que la technologie sur laquelle ils avaient travaillé durant leur doctorat pourrait résoudre un problème majeur pour l’industrie pharmaceutique : comprendre le degré de solubilité de certaines substances, base de leur efficacité.
En suivant un cours d’Innosuisse, ils développent le concept de leur business, réalisent des entretiens avec des acteurs clés du secteur et développent leur idée. La startup voit le jour la même année et lève rapidement des fonds pour ses premiers prototypes : 1,2 million de francs suisses via divers programmes d’investissements publics non-dilutifs jusqu’en 2023. .
Début 2024, elle lève 830’000 francs supplémentaires lors d’un tour de table avec plusieurs business angels spécialisés. En juin 2024, 2,5 millions d’euros s’ajoutent grâce à une bourse européenne.
Aujourd’hui, la structure compte trois membres : deux cofondateurs employés et un troisième docteur en physique, spécialisé dans le développement du logiciel propre à la solution d’ORYL Photonics. Depuis le 1er octobre, ORYL Photonics a quitté son siège de l’EPFL pour s’installer au Biopôle, tout en continuant à travailler étroitement avec des laboratoires de l’EPFL. Un premier prototype avancé existe, il doit désormais être amélioré afin de lancer des pré-séries du produit pour une première commercialisation en 2025. Entretien avec Nathan Dupertuis, co-fondateur et COO.
Quel est l’avantage ou l’innovation principale de votre technologie ?
Nathan Dupertuis : Pour détecter la solubilité d’un composant, notre laser envoie un rayon infrarouge sur un échantillon liquide. La lumière est pulsée et modulée très rapidement selon des paramètres précis, notre expertise réside ici. Elle va interagir avec la matière pour générer de la lumière verte, qui provient des électrons de la matière ayant été stimulés. Cette lumière dite « de seconde harmonique » est beaucoup plus intense avec certains arrangements de molécules dans un matériau. Notre méthode permet de détecter avec une très grande sensibilité la présence dans un liquide de particules non-dissoutes ou qui s’agrègent. Elle est aussi plus rapide, moins énergivore et chère que les méthodes existantes, qui consomment beaucoup de produits chimiques, ou sont bien moins fiables.
Quelle a été le principal défi dans votre aventure entrepreneuriale ?
L’un des défis pour nous est de sortir de notre zone de confort pour aller faire des ventes. Je suis scientifique, je ne pensais pas devenir un commercial. J’ai appris en discutant, en écoutant des podcasts. Je me dis qu’il est normal d’avoir une rémunération, qu’il ne faut pas se « sous vendre. » Et puis surtout que l’approche intéressante reste de chercher à comprendre les besoins des gens, voir comment les aider, non pas de vendre à tout prix. Si une personne n’a pas besoin de mes services, l’échange m’aura au moins permis d’améliorer ma connaissance du marché.
Que vous apporte l’aide de GENILEM ?
Nous sommes coachés depuis 2023. Nous avions déjà du coaching avec Innosuisse, et pour éviter la redondance nous avons séparé les domaines : la vente des services aux industries pharma et le branding ont été traités avec Innosuisse. Et Gabrielle, notre coach GENILEM nous aide davantage sur le marketing, les campagnes d’email pour atteindre des clients, les campagnes sur LinkedIn ou encore les communiqués de presse. Le coaching est une ressource « à la carte », mais pour qu’elle porte vraiment ses fruits il faut aller la chercher, demander des sessions, expliquer ses besoins, ne pas rester passif.
Vous avez réalisé des levées de fonds très importantes, quelle a été votre stratégie ?
Début 2023, une bourse européenne nous a échappé, il nous a fallu chercher de l’argent, améliorer notre pitch et participer à plusieurs évènements. Rien n’a été facile.
C’est en étant mis en lien avec un alumni de l’EPFL, que tout a changé. CEO d’un spin-off de l’école, il nous a connectés avec l’un de ses investisseurs. Et celui-ci nous a pour ainsi dire, pris sous son aile. Il a proposé de nous aider à lever des fonds, contre un pourcentage, qu’il s’engageait à réinvestir dans l’entreprise. C’est ce point qui a convaincu d’autres investisseurs. Ainsi, nous avons réuni, en janvier 2024, 830’000 CHF. Il est entré au Conseil d’administration de l’entreprise, aux côtés d’un autre investisseur. Tous deux ont des profils complémentaires, le premier dans le business des sciences de la vie, le second dans les entreprises pour les instruments de laboratoire pharmaceutique.
En juin 2024, nous avons finalement obtenu la bourse européenne convoitée : 2,5 millions d’euros, avec un consortium européen qui complémente notre expertise interne. Nos choix financiers nous apportent donc aussi des savoir-faire et des compétences qui nous permettent de rester extrêmement frugaux au sein de l’entreprise.
Propos recueillis par Camille Andres
Crédit photos : Thomas Cerato